ANNECY | Ville où il fait bon vivre : Les coulisses d’un coup médiatique.

ANNECY | Ville où il fait bon vivre : Les coulisses d’un coup médiatique.

PUBLIE LE 19/01/2020 par La Rédaction - 12091 vues

Difficile de passer à côté de l’info clé de ce dimanche, le JDD publie en exclusivité un classement réalisé par l'association « Villes et villages où il fait bon vivre ».

Annecy arrive en tête des villes de plus de 2000 habitants. Très rapidement la nouvelle a enflammé les réseaux sociaux. Une véritable surprise pour les internautes de la cité lacustre qui se sont pressés des problématiques absentes des 182 critères de l’étude (classées selon un sondage national) reprenant des données INSEE officielles.

Une association apolitique ?

Ce n’est pas ce qu’on peut dire quand nous découvrons que son Président (Thierry Saussez) compte parmi les conseillers communication les plus renommés de la capitale. La sortie d’une telle étude à deux mois des municipales constitue tout sauf une coïncidence. En effet, en 2008, le Figaro considère déjà l’homme comme un spécialiste reconnu de la communication politique. À cette époque, après avoir déjà conseillé Alain Juppé, il devient l’homme communication « anti-couacs » du Président Sarkozy, en charge de la communication interministérielle et assure la direction du Service d'Information Gouvernementale (SIG). Thierry Saussez, encarté RPR et UMP était à la tête de l’agence Image et Stratégie vendue à Euro RSCG (héritière des fusions et absorbations de l’agence « Roux Séguéla » devenue depuis Havas Média). La vente intervenait juste avant la nomination.

Un label désintéressé ? L’argent public comme financement.

Selon un calcul rapide, l’étude était vendue 498 € aux communes. L’étude pourrait rapporter 697 200€ si toutes les communes concernées l’achètent.

Réseautage ?

C’est ce qu’affirme une de nos sources proche des dossiers politiques. « C’est curieux car le premier à se féliciter de l’info sur les réseaux sociaux c’est Bruno Basso, chef de file des Républicains pour les municipales. Étonnant aussi, Caroline Cayeux, Maire de Beauvais est citée dans cet article, en tant que Présidente de l’association « Villes de France ». Il est établi qu’elle réunionne régulièrement (3 à 4 fois par an) avec Jean-Luc Rigaut dans le cadre de son mandat de l'Assemblée des Communautés de France (AdCF). Des réunions auxquelles assisterait également François Baroin, Président de l’association des Maires. »
Nous nous entretenons alors avec une consœur de Beauvais. Après une heure d’échanges, le constat est déroutant. Caroline Cayeux brigue un 4^ème mandat avec « un soutien de La République en Marche » après un passé « Les Républicains ». Notre consœur nous parle d’un animal politique au réseau énorme, ayant ses entrées auprès du Premier Ministre. « On vient d’ailleurs de lui offrir la présidence de l’Agence Nationale de la Cohésion des Territoires, un poste que vous ne pouvez pas avoir sans le soutien de LaREM.  Elle est clairement ministrable et il est pratiquement certain que son mandat se finira au niveau national. Depuis quelques années, la problématique des territoires est son fer de lance. » Le parallèle avec le Maire sortant d’Annecy interroge.

Finalement, c’est dans des archives politiques que nous trouverons. En novembre 2010, Caroline Cayeux soutient pour les départementales un jeune candidat UMP, lequel est conseiller auprès de… Thierry Saussez, alors conseiller auprès du Président Sarkozy. Lequel candidat de l’époque (Sébastien Chenu) a pris depuis ses distances avec la droite pour rejoindre l’extrême droite.

Fiabilité statistique ?

Si le sérieux de l’INSEE et d’OpinionWay ne sont pas à remettre en cause, de nombreux candidats d’opposition ont soulevé l’absence de données statistiques récentes pour Annecy. Rien depuis la commune nouvelle en tout cas. Les données étudiées ne concerneraient donc qu’Annecy historique, et seraient donc à mettre à l’écart de la campagne des municipales.

Réactions de François Astorg, Denis Duperthuy et Frédérique Lardet :

Forcément, si la majorité sortante en campagne se félicite d’une étude nationale, reprise par toute la presse de France et commandée par la commune, les téléphones chauffent dans les rédactions, même le dimanche.

Pour Denis Duperthuy : « Les Annéciens savent qu’ils vivent dans un cadre extraordinaire. Pour autant ce n’est pas le Maire qui a posé le lac et les montagnes à cet endroit. On a pas besoin d’experts parisiens pour savoir quelles sont les problématiques locales. Les préoccupations locales sont mal ou pas reflétées par les critères de l’étude. Il y a clairement quelqu’un qui a sélectionné les critères qui étaient bon pour Annecy. »

François Astorg : « C’est une sorte d’étude façon guide Michelin. La question est de savoir si c’est vraiment objectif ou si y’a une idée de business derrière. Sur le fond, les enquêtes ne sont pas déclaratives, elles se disent objectives sur des données INSEE. En revanche, l’ordre de classement des 182 points est basé sur l’ensemble des Français mais les Annéciens n’ont pas été interrogés. Ce que vivent les gens, ce n’est pas ça. Les gens d’Annecy nous parlent de pollution, visiblement pas les Français du panel OpinionWay. On est contents de vivre à Annecy mais le reflet de cette étude n’est pas ce que vivent les gens ici. Si on les interroge, la réponse sera tout autre. »

Frédérique Lardet : « En tant qu’Annécienne, je suis très contente, je suis très chauvine. Aujourd’hui, le problème n’est pas Annecy mais sa qualité de vie qui se dégrade sans cesse du fait d’une inaction complète du Maire sortant. Je me pose la question si les statistiques de l’INSEE qui datent de 2014 ne relèvent pas d’Annecy historique et ne concernent en rien la commune de 126 000 habitants. La commune est mentionnée sur la carte de l’article comme comptant plus de 100 000 habitants avec des données qui datent de 6 ans. »

Photo; Journal le JDD